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Sport et société
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25 février 2016

Rencontre avec Bruno Chambardon, ancien cycliste de haut niveau

L'univers du cyclisme est un univers très peu connu du grand public. Les relations entre coéquipiers, le quotidien et surtout le dopage* sont des aspects très mystérieux de la vie d'un cycliste. Nous avons cherché à en savoir plus en rencontrant Bruno Chambardon, un ancien cycliste de haut niveau. Il a accepté de partager son expérience avec nous. Cette interview a été réalisé chez lui, dans le Pays de Gex.

Bonjour monsieur Chambardon et merci d'avoir accepté de nous rencontrer. Pour commencer, pouvez-vous nous dire à quel âge vous avez commencé le cyclisme ?

Bruno Chambardon : Oui bien sûr. J'ai commencé à l'âge de 4 ans. J'ai tout d'abord appris les bases du vélo dans une école de cyclisme. J'ai effectué mon premier parcours, long de 20 km, en minimes. A l'époque, je faisais aussi du ski. J'ai d'ailleurs participé à un Championnat de France de ski mais mon mauvais résultat ce jour-là m'a poussé à choisir définitivement le cyclisme. Je n'ai pas remporté de victoire en minimes. Par contre, j'ai commencé à gagner des courses en cadet. Par la suite, je suis devenu champion de France dès ma première année en junior. Lors de ma deuxième année en junior, j'ai remporté beaucoup de courses, ce qui m'a permis d'être présélectionné pour les Championnats du Monde junior.

Pourquoi avez-vous choisi le cyclisme ?

B. C. : Tout simplement parce que mon père en faisait et parce que l'on n'a besoin de personne dans ce sport. C'est un sport qui donne sa chance à la jeunesse et qui me permettait de me faire plaisir.

Quelles valeurs attachiez-vous au cyclisme à l'époque ?

B. C. : La remise en question permanente de soi. Il faut tout le temps se remettre en question. J'aimais aussi le fait que, contrairement au ski, la chance n'existe pas dans le cyclisme. Si tu fais tout pour être prêt, tu es prêt. Il y a également l'esprit d'équipe et le respect de l'adversaire.

À quel niveau de compétition êtes-vous arrivé ? Étiez-vous par exemple encadré par des médecins ? Aviez-vous un régime particulier ou des interdictions ?

B. C. : Au total, j'ai gagné 150 courses. Je suis arrivé jusqu'aux Championnats du Monde et j'ai été présélectionné pour les Jeux Olympiques. J'avais un médecin, un kiné, et je devais éviter de boire de l'alcool et de fumer. Je n'avais pas forcément d'interdictions mais simplement des recommandations. On me conseillait de ne pas faire de foot l'hiver, pour préserver mes genoux. Mais le coureur devait aussi prendre ses responsabilités, notamment en Équipe de France. Lorsque tu représentes ton pays, tu dois faire attention à le respecter, à ne pas le déshonorer.

À quel rythme vous entraîniez-vous ? Avec quelles exigences ? Quelle était la fréquence des courses ?

B. C. : Avant les compétitions, j'avais deux entrainements par semaine, pendant lesquels on faisait des grandes distances. On faisait une pause entre le 15 décembre et le 15 janvier, et on avait donc un mois pour profiter et se détendre. En mars et en avril, on travaillait sur piste. On sortait sur route plus tard. On faisait 115-130 bornes le week-end et 3h de vélo le mercredi, donc environ 90 bornes. Au début de l'année, on ne s'entraînait pas en fonction des futures compétitions, on faisait ce qu'on appelle un travail de fond, pour avoir les bases. C'est comme lorsque l'on construit une maison, on commence par les fondations, pour que toute la structure soit solide, et après on fait le reste. En cyclisme, une fois que l'on avait nos fondations, on travaillait de façon plus spécifique, en fonction des compétitions qui arrivaient. Mais il fallait toujours commencer par le travail de fond.

Quand avez-vous arrêté le cyclisme et pourquoi ?

B. C. : J'ai arrêté deux fois. En 1989, j'ai eu un accident de voiture alors que j'étais présélectionné pour les Jeux Olympiques de Barcelone. J'ai repris deux ans plus tard. Le réapprentissage a été très long et difficile. Les jours où tu pars rouler et que tu te fais doubler par un petit vieux sur un vélo "pourri", ça met un coup au moral. Mais j'ai fini par retrouver mon niveau. J'ai définitivement arrêté la compétition quelques années plus tard.

Qu'avez-vous éprouvé lorsque vous avez été contraint d'arrêter ?

B. C. : Je me suis remis en question sur mon avenir. Je n'ai pas réussi à passer professionnel alors je me suis demandé si j'en aurais été capable. J'ai gardé un véritable regret, celui de ne pas être allé aux Jeux Olympiques de Barcelone. Mes études ont également été compliquées. J'étais au Lycée de Ferney, j'ai été renvoyé parce que je n'étais pas assez présent et j'ai été repris plus tard. J'ai fait deux secondes, deux premières et deux terminales. J'ai passé mon bac de français en septembre car en juillet avait lieu le championnat de cyclisme sur piste. Les études en même temps que le sport, c'est très difficile à gérer.

Les valeurs que vous attachiez au cyclisme au début de votre carrière étaient-elles toujours les mêmes à la fin de votre carrière ?

B. C : Oui, globalement ces valeurs n'ont pas bougé. Et puis, je pense que ce n'est pas uniquement dans le cyclisme mais dans le sport en général, qu'on retrouve ces valeurs-là. L'esprit d'équipe, on l'a quoi qu'il arrive parce qu'on travaille en équipe donc il faut savoir à la fois être mis en avant par son équipe et travailler pour les autres. La remise en question, c'est parce qu'on n'a jamais rien sans rien, il faut s'entraîner, il faut travailler dur pour y arriver. Et enfin, il y a le respect de l'adversaire, qui est un allié pendant un moment de la course et qui devient un adversaire sur la fin. Quelqu'un qui est moins fort que toi sur le papier, tu ne le regarde jamais de haut. Moi, j'ai l'exemple d'une course à Chavannes, où j'étais le plus fort, le plus rapide. J'avais gagné avant le départ. Et finalement... je fais deuxième. Parce que la course se passait bien, parce que je n'ai pas voulu attaquer car je savais que j'étais le meilleur au sprint. Si j'avais été un peu plus sérieux, j'aurais gagné. 

Vous êtes-vous recyclé facilement après la fin de votre carrière ? 

B. C. : Je pense que je ne suis pas arrivé assez haut au niveau sportif pour avoir besoin de me recycler. Je me suis recyclé en reprenant mes études. 

Il n'y a donc pas une grande reconstruction à faire...

B. C. : Il y a quand même une sorte de phénomène de dépression lorsque l'on arrête sa carrière, parce qu'on repart dans l'inconnu, et pour moi, repartir dans les études alors que ça ne me plaisait pas, que je n'étais pas fait pour ça, ça n'a pas été simple. Il y a donc eu une remise en question, je me suis demandé ce que j'allais faire de ma vie et comment j'allais la mettre en place. Je ne voulais pas rester derrière un bureau, j'avais fait du sport, j'avais voyagé, donc je me suis dit que le domaine de la communication était peut-être quelque chose qui pouvait me convenir. Je suis reparti en études de communication et là je me suis éclaté. Ça m'a prouvé que j'étais capable de faire des études et après, tout s'est bien passé. C'est un plan carrière, tout simplement, tu te demandes ce que tu veux faire et tu te donnes les moyens d'y arriver. 

Le cyclisme et le sport vous ont-ils été utiles pour votre nouvelle vie ?

B. C. : Oui parce que, encore une fois, tu apprends à te remettre en question et à t'investir. Je pense que dans la vie, tout est pareil, lorsque l'on a un problème, il faut se remettre en question, il faut s'investir. Donc oui, le sport m'a aidé, ça a été une belle école.

Vous êtes-vous fait des amis pendant votre carrière ? 

B. C. : Oui. J'en ai gardé trois, dont un qui était en Equipe de France et qui est aujourd'hui le parrain de mon fils. Je le vois environ trois par an, on se fait une sortie en ski l'hiver, une sortie en vélo l'été. C'est une vraie amitié. Sinon, j'ai gardé des contacts avec mon entraîneur en Équipe de France, le sélectionneur, qui est un homme extraordinaire.

L'amitié est-elle encore possible à partir d'un certain niveau ? Avec vos adversaires par exemple ?

B. C. : Oui c'est possible. Une fois descendu de ton vélo, tu es copain. Avant cela, tu n'as pas de lien amical, parce qu'il y a une course, un bouquet et un titre à gagner. Et même au sein de la même équipe, quand tu arrives avec un coéquipier à un kilomètre de l'arrivée, tu cesses d'être copainpour le redevenir après la ligne. Bon, quand je dis que tu n'es plus copain, tu ne vas pas non plus faire des "crasses" à l'autre, tu reste toujours "propre", mais il faut te battre. Si ce n'est pas toi qui le bats, c'est lui qui le fera, c'est comme ça. Mais les amitiés sont possibles, oui. Comme dans tous les sports, j'imagine. La jalousie a toujours existé certes, mais la véritable amitié a toujours existé aussi.

Le cyclisme est malheureusement régulièrement atteint par des histoires de dopage. Avez-vous été confronté à ce problème ?

B. C. : Oui. Le cyclisme est confronté au dopage comme tous les sports, la seule différence est que le cyclisme est beaucoup plus contrôlé que les autres sports. Des tricheurs, il y en a toujours eus et il y en aura toujours. Oui j'ai été confronté au dopage. La vraie question est de savoir si j'en ai déjà pris, et la réponse est non, je n'en ai jamais pris. C'est pour ça que je me demande souvent "est-ce que j'aurais eu la capacité de passer professionnel ?". Je n'en sais rien. J'ai toujours réussi à gagner grâce à mon entraînement, mon sérieux et mes capacités. Le professionnalisme, c'est autre chose. J'ai été confronté au dopage en Equipe de France, on m'en a parlé, on m'en a proposé, je n'en ai pas pris, parce qu'une réputation, c'est très long à construire et très rapide à détruire. C'est instantané. Dans le Pays de Gex, si je me fais contrôler une fois positif, c'est terminé, je suis un drogué et je suis un tricheur, quoi qu'il arrive. Et ça pour moi, ça avait beaucoup plus d'importance qu'une victoire. Maintenant, j'aurais aimé me doper, très honnêtement. Pour essayer, pour voir ce que c'est. La Faucille, je sais que je la monte en 29 minutes, de la Poste jusqu'en haut. J'aurais voulu savoir en combien temps je pouvais la monter, une fois... "équipé" on va dire. Mais sachant qu'à mon niveau je pouvais être contrôlé également à l'entraînement, risquer de passer pour un drogué ou un dopé juste pour se rendre compte et faire une expérience, non. 

Par contre, oui j'y ai été confronté parce qu'on m'en a proposé et parce que j'en ai souffert aussi. Il y a une course qui m'a marqué à Apt, où il y avait... Monsieur X, je ne vais pas dire qui c'est. Son beau-frère était professionnel, on avait une course avec un circuit de 30 kilomètres à faire quatre fois. Et il y avait un col qui était juste un truc horrible. J'étais en super forme, je rentrais des Championnats du Monde donc je tournais vraiment comme une moto, et je fais deuxième. Il faisait 30-35 degrés, à la sortie du dernier col, je "bascule" avec 1 minute 15 de retard. Je suis un rouleur, je suis un sprinteur, je suis fou en descente, je bouche quasiment tout le trou dans la descente sur le bonhomme et je reviens à 15 secondes de lui alors qu'il reste 5 bornes de plat. Et je suis resté à 15 secondes derrière lui pendant 5 bornes. Je roulais à 65 à l'heure. 65 à l'heure. J'étais vraiment au top de ma forme.

Il gagne - donc je me dis qu'il est plus fort que moi pas de soucis - et puis j'apprend plus tard qui est son beau-frère. C'était quand même quelqu'un de réputé dans le milieu. J'étais en tee-shirt sur le podium, il était avec le bonnet, la veste thermique, et il tremblait. Et il me dit "C'est bien, petit, t'as bien couru". J'ai perdu une course sur une histoire de dopage. Un mois après, le mec était contrôlé et radié de la fédération. Donc j'en ai souffert, indéniablement. Quand tu prends le départ d'une course, que tu sais que tu es le plus fort, que tu fais tout pour gagner, et que tu te fais battre, ça arrive ; mais te faire battre par un mec qui a pris, c'est... (il ne termine pas sa phrase).

Et j'y ai été confronté ici, à Ferney. Il y avait une nocturne, on devait courir de nuit sur un petit circuit. C'est très rapide, très court, et il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup d'argent à gagner. Et une fois, on m'a dit : "tu cours bien, tu es bien, tu es en forme, la prochaine fois tu viens nous voir et on te donnera ce qu'il faut". Mais je n'ai jamais pris, non. Je n'ai jamais pris. Pourtant, c'est facile de prendre, très facile. Et puis, juste un truc important, on peut aussi être positif sans trop le savoir. Moi par exemple, j'ai été suivi médicalement en Equipe de France, on a pris des vitamines, des reminéralisants - des produits tout à fait autorisés et on a été contrôlé très régulièrement pour surveiller. Mais quand tu es dans un milieu professionnel - on revient au niveau des études, ils n'ont pas forcément des niveaux d'étude très élevés - que ton médecin te soigne, te suit et te donne des petites pastilles à prendre pour récupérer, avoir une vitamine ou quoi que ce soit, tu ne poses pas de question. Tu ne te demandes pas à quoi tu as le droit ou pas le droit, tu fais confiance à ton médecin. 

Lance Armstrong (ancien cycliste professionnel reconnu coupable de dopage) a déclaré "Il est impossible de gagner sans dopage". Est-on obligé de se doper pour accéder au plus haut niveau ?

B. C. : Non. Si tout le monde est sur le même pied d'égalité, on peut le faire sans. Mais dès qu'il y en a un qui commence à tricher, il va être au-dessus. Donc le deuxième se dit "pourquoi pas moi" et ainsi de suite. Je reviens à ce que je disais tout à l'heure, c'est pour ça que, quand tu es dans un peloton, que tu as tout fait, que tu es prêt, que tu as été amateur, que tu as été propre, que tu t'es entraîné et puis que tu te prends des "casquettes" tous les week-end, tu te dis : "oh ! Ce mec-là, je le bats régulièrement, la saison d'avant il était derrière moi et maintenant il est toujours devant !"

Mais oui, on peut, fondamentalement, on peut. Il y a un exemple très concret sur le Tour de France. Sur le Tour de France avant, on faisait 1500 bornes en trois semaines et aujourd'hui, on fait 2500 bornes en trois semaines. Donc aujourd'hui, c'est certainement plus compliqué de faire un Tour de France à l'eau minérale. Après, il faut savoir ce qu'on appelle le dopage. Si le dopage, c'est le fait d'améliorer sa condition physique, je suis d'accord, mais moi je considère que le dopage, c'est prendre un produit qui permet de pallier une carence. Si tu prends une vitamine pour te soigner, tu es dopé. Parce que, par définition, ce n'est pas ton corps qui réagit. Donc il faut mettre des limites. Mais gagner à haut niveau en étant propre, oui c'est possible... pour autant que tout le monde soit propre. 

Et si, par exemple, à l'entraînement, on prend quelque chose qui pourrait nous stimuler, nous aider à nous muscler ou à atteindre plus rapidement un certain niveau, est-ce que c'est se doper, même si ce n'est pas pendant la course ?

B. C. : La définition du dopage, c'est qu'à partir du moment où l'on te contrôle et qu'on détecte un produit stimulant ou dopant, tu es dopé. Il y a un truc qui s'appelle "pas vu, pas pris". Si l'on ne te prend pas ou que les produits n'ont plus d'effet, tu n'es par définition pas dopé. Il faut savoir qu'il y a des produits qui sont à retardement. Ce sont des produits que tu peux prendre pendant l'entraînement mais qui, à un moment ou un autre, ne sont plus décelables et continuent à améliorer tes performances. Ça, ça reste du dopage. À partir du moment où tu prends un produit extérieur, pour moi, c'est du dopage. 

Y a-t-il encore de l'humanité dans le milieu ou est-ce que c'est un sport uniquement obsédé par les résultats ?

B. C. : Non, je pense que, fondamentalement encore une fois, ce n'est pas un sport plus sale que les autres. Il est beaucoup plus contrôlé. Et puis, il y a des produits interdits dans le vélo qui ne le sont pas dans le foot, par exemple. Pendant des années, on n'a pas interdit la créatine dans le foot. C'est un produit dopant. En vélo, depuis des années, la créatine est interdite. Mais en dehors de ça, non, ça reste un sport avec de l'humanité, du respect, de l'engagement. Il y a quinze noms qui reviennent régulièrement et qui polluent le vélo, qui le salissent. Il y en a quinze. Lance Armstrong, je suis désolé, mais il n'est pas pire ou meilleur qu'un autre. On lui a retiré ses titres du Tour de France. Super, on a enlevé un dopé, on est content. Mais tu prends le quatrième ou le cinquième Tour qu'il a gagné, si tu enlèves tous ceux qui ont été contrôlés positifs, c'est le onzième qui gagne le Tour de France. Donc il a gagné, c'est lui, c'est un "salaud". Mais non, ce n'est pas plus un "salaud" qu'un autre. 

Après, il y a quand même 80% des coureurs qui sont propres, pour moi. Vous avez dû le repérer, on n'a plus entendu parler de nos Français pendant des années, et comme par hasard, depuis deux ans, ils reviennent. Comme par hasard, depuis deux ans, les contrôles anti-dopage sont devenus drastiques. Nos Français ne sont pas meilleurs maintenant qu'avant, ils sont juste revenus à leur place parce qu'en France, dans les équipes françaises, si t'as un coureur français qui est pris positif, il est licencié. C'est fini. Mais ça reste un sport avec encore de l'espoir. La seule différence, c'est qu'il est très médiatisé, qu'on en parle beaucoup plus que les autres et qu'il y a des contrôles de folie. J'ai été à l'INSEP (Institut National du Sport, de l'Expertise et de la Performance) pendant des années, j'ai côtoyé des gens de très haut niveau, des champions olympiques, et je peux vous dire que certains champions olympiques, la veille des grandes compétitions, prenaient des choses qui les rendaient agressifs. J'ai vu des champions de tir à la carabine ou de tir à l'arc prendre des choses pour avoir moins de tremblements au moment du tir. C'est dans tous les sports. Tous les sports. En Formule 1, on prend des choses pour ne pas avoir peur. J'ai travaillé pendant cinq ans dans la Formule 1, je suis bien placé pour en parler. Mais jamais personne n'en parle, de ça. 

Mais alors pourquoi le cyclisme est-il plus contrôlé ?

B. C. : Parce que c'est un sport médiatisé. On a le Tour de France. C'est l'un des seuls sports aujourd'hui où tu ne paies pas pour aller le voir. Donc ça amène une masse populaire de personnes impressionnante. Tu paies ta place au foot, tu paies ta place au tennis, tu paies ta place pour tout, sauf pour le vélo. Le Tour de France, c'est gratuit pour le spectateur donc il y a un engouement populaire réel. La presse s'y est mise. C'est beaucoup plus mis en avant que le reste. 

Vous entraînez aujourd'hui sur votre temps libre les U11 (moins de 11 ans) du club de foot d'Echenevex. Est-ce qu'il y a des choses comparables, même si ce n'est pas du tout le même niveau ? 

B. C. : Je pense que dans le sport, quel qu'il soit et à quelque niveau que ce soit, les valeurs restent les mêmes. C'est le sérieux, le respect de l'adversaire, l'esprit d'équipe, la remise en question. Ce que j'apporte surtout aux enfants à Echenevex, c'est l'esprit d'équipe et la hargne. Je leur apprends à se battre sur le terrain. Je leur montre que ce n'est pas parce qu'on prend un but que le match est fini. Je fais rarement des exercices techniques avec les enfants - je les fais faire aux autres coachs qui sont beaucoup plus passionnés que moi - je leur fais faire du mental et du physique. L'équipe que j'entraîne en ce moment, qui a le niveau qu'elle a, je ne lui ai pas appris grand-chose au niveau technique. Je lui ai appris à se "défoncer", je lui appris que, si on gagne un match ou si on marque un but, ce n'est pas grâce à celui qui a marqué mais grâce à toute l'équipe, et je leur ai appris que, si au contraire on encaisse un but, ce n'est pas le gardien qui a fait une erreur, c'est toute l'équipe qui a fait une erreur. On est passé du stade "c'est de ta faute si on a perdu" au stade "on n'a pas été bons aujourd'hui". Et ça pour moi, c'est une victoire. 

Vous avez vécu le cyclisme en tant que joueur et maintenant le football en tant qu'entraîneur...

B. C. : J'ai aussi été coach en vélo, pendant plusieurs années. Et puis, je suis coach à Echenevex parce qu'il y a mon fils. S'il faisait du vélo, je serais sur un vélo. 

Est-ce que vous vous reconnaissez dans certains de vos joueurs ?

B. C. : Oui. J'en reconnais certains, oui. Je reconnais des guerriers (il sourit).

Et bien merci beaucoup Monsieur Chambardon de nous avoir reçus et d'avoir répondu à nos questions !

B. C. : Mais de rien ! N'hésitez pas à me recontacter au cas où vous auriez besoin d'informations supplémentaires !

Cette interview a été très intéressante pour nous. Nous avons appris énormément de choses et les anecdotes de Monsieur Chambardon étaient très instructives. Nous en savons désormais beaucoup plus sur l'univers du cyclisme et notamment sur le dopage. Nous avons ainsi appris le sentiment d'impuissance ressentis par certains sportifs lorsqu'ils courent face à des adversaires dopés. Nous avons mieux intégré le sens du mot dopage et nous comprenons le quotidien d'un cycliste de haut niveau. Nous avons été surpris de recevoir autant d'informations sur l'omniprésence du dopage dans le cyclisme et le sport en général. S'il y a une chose que nous retiendrons de cette interview, c'est que le cyclisme est loin d'être le seul sport touché par le dopage.Cet entretien nous a permis de démonter des clichés qui ont la vie dure : non le cyclisme n'est pas le sport dans lequel on trouve le plus de dopage.

En ce qui concerne le thème de notre Dossier Spécial, cette interview nous a permis de mieux comprendre "l'envers du décor" et la réalité d'un monde parfois cruel pour ses héros. 

Cela a en tout cas été un privilège de pouvoir échanger avec un sportif arrivé à un tel niveau. 

Tiago C., Sébastien B. et Antoine G.

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